La Fondation Blaise Pascal, au service de la médiation scientifique
Dans quel contexte la Fondation Blaise Pascal a-t-elle vu le jour ?
La Fondation a été créée en 2016 sous l’impulsion de Serge Abiteboul, informaticien, et de Cédric Villani, mathématicien. Tous deux investis dans le champ de la médiation scientifique, ils ont tenu à créer une structure mixte, financée à la fois par des fonds publics et privés. Portée par la Fondation Innovation et Transitions, la Fondation Blaise Pascal peut lever des fonds, soutenir et suivre des projets. Elle est soutenue par des grandes entreprises : c’est le signe que le besoin de culture scientifique est partout ! Les problèmes de recrutement sur les postes scientifiques sont une réalité, et la Fondation agit en amont, en soutenant des actions qui s’adressent à un public jeune. Nous fédérons également les acteurs de la médiation scientifique, avec une relation qui va souvent plus loin que la simple dotation financière. Nous sommes investis dans le montage et le développement de projets, comme avec les “Coding goûters”. Notre action mobilise beaucoup d’acteurs et de partenaires. Il reste encore un travail de fond considérable à faire en matière de médiation scientifique !
Comment êtes-vous arrivée à la Fondation Blaise Pascal ?
J’ai été nommée en septembre dernier à la présidence du Conseil Scientifique, en lien avec mon parcours. Enseignante chercheuse en informatique, j’ai par ailleurs été journaliste durant trois ans pour le magazine "La Recherche". Je me suis rendu compte à l’époque du gouffre entre la science lue dans la presse et la vraie science. C’est une question de citoyenneté que de comprendre les enjeux des mathématiques, de l’informatique, des statistiques ou de l’IA ! Impossible d’être un citoyen éclairé si on ne comprend pas les bases de ces disciplines. J’ai dit oui pour cette fonction, car j’y crois. C’est notre devoir de scientifiques de faire de la médiation.
Comment s’articule la gouvernance de la Fondation ?
La Fondation est constituée d’une équipe opérationnelle de trois personnes. À cela s’ajoute un conseil stratégique, qui se réunit deux fois par an pour déterminer les grandes orientations politiques de la Fondation. Enfin, le conseil scientifique que je préside. Notre rôle est d’évaluer les projets qui candidatent sur nos deux appels à projet au printemps et à l’automne. Le premier porte sur les stages et clubs en mathématiques et informatique, le second sur tous les projets liés à la médiation scientifique. Nous décidons collégialement de financer ou non, en fonction d’une série de critères.
Qui peut participer, et dans quel intérêt ?
Association, entreprise, collectivité, tout le monde peut participer. Nous allouons une enveloppe jusqu’à 8000 € par projet pour l’appel à projets d’automne et 5000 € pour celui du printemps. Nous recevons beaucoup de dossiers - le dernier appel à projet a recueilli 51 candidatures. Les formats sont très variés : jeux, ateliers, escape games, fablabs… Le conseil scientifique commence par vérifier que le projet répond bien à la demande, avec du contenu scientifique de qualité, lié aux maths ou à l’informatique. Le projet doit répondre à un objectif de médiation, avec des publics acteurs de leur activité. Le budget doit être réaliste, avec un impact en cohérence avec la somme demandée. Nous sommes bien sûr attentifs aux publics visés, les filles et les publics éloignés étant notre priorité.
En quoi est-il essentiel de diffuser la culture scientifique auprès des jeunes de la primaire au lycée ?
La Fondation a fait le choix de cibler les jeunes, en premier lieu pour l’enjeu que comporte l’orientation scolaire. Mais il ne s’agit pas de faire en sorte que tous poursuivent des études scientifiques ! Les élèves doivent cependant avoir les moyens de faire leur choix de façon éclairée. On constate en effet que les choix d’orientation ne sont pas forcément faits pour les bonnes raisons : certains ont peur que ce soit trop dur, de suivre des filières qu’ils pensent déshumanisées.
La Fondation se concentre sur deux cibles prioritaires. La première, ce sont les filles, qui subissent des mécaniques d’exclusion claires : harcèlement, stéréotypes... Cette population est significativement sous-représentée dans les études scientifiques, et c’est un vrai problème pour les mathématiques et l’informatique. Notre deuxième cible, ce sont les publics éloignés géographiquement et socialement de la culture scientifique. Soit qu’ils sont loin des centres-villes, des musées, des actions associatives… Soit qu’ils ne se sentent pas autorisés à fréquenter ce type de lieu ou d’événement.
Quels sont les acteurs significatifs de ce travail de médiation ?
En France, on compte beaucoup d’acteurs très variés. Cela va des grosses structures, comme MATh.en.JEANS ou Class’Code, aux petites associations très locales, de la MJC à la compagnie de théâtre. Très souvent, les actions de médiation sont portées par des enseignants de tous niveaux, qui s’appuient sur ces petites structures pour diffuser la culture scientifique.
Qu’en est-il des filles et des matières scientifiques ?
Nous accompagnons de nombreux projets visant à donner aux filles le goût des matières scientifiques. Durant toutes mes études, j'étais une anomalie dans des classes en grande majorité masculines. Je pense qu’il faut montrer aux filles qu’elles ont leur place sur ce type de filière. J’ai en tête les Journées Filles Maths et Informatique qui proposent de faire découvrir à des collégiennes et lycéennes les études et les métiers liés aux maths et à l’informatique. Ou encore un projet réalisé en région PACA, “Les Cigales”. Deux fois par an, il invite des lycéennes à suivre des stages de mathématiques et d’informatique dans un lieu fantastique en bord de mer. Beaucoup de projets se donnent pour objectif d’atteindre une parité parfaite entre filles et garçons, comme le Camps AstroMaths. C’est aussi une bonne façon de faire !
Vous soutenez également des projets en faveur des jeunes de zones rurales ou QPV. Pouvez-vous m’en dire plus ?
Lors des appels à projets, nous soutenons de nombreuses actions menées sur ces territoires. Les projets que nous co-organisons sont aussi tournés vers ces publics : les coding goûters, par exemple, sont majoritairement organisés par des structures en QPV ou en zones rurales. L’année dernière, la fondation et ses partenaires ont organisé 155 coding goûters dans 11 départements, pour 2024 enfants et 943 familles !
Que vous apporte votre participation au conseil collégial de Class’Code ?
Class’Code fait partie de nos partenaires au long cours. Produire des contenus scientifiques et informatiques pour toutes les classes d’âges et pour les enseignants est une intersection logique avec la mission de la Fondation. Nous ne sommes pas acteurs de l’Éducation Nationale, mais la vision de terrain portée par Class’Code est vraiment importante pour nous. Notre présence au conseil collégial nous permet de rester en veille sur les sujets chauds et les formats qui fonctionnent auprès des enseignants et des élèves.
Quels sont les projets de la Fondation à moyen et long terme ?
Cette année, nous projetons de réaliser des capsules vidéos autour de l’éthique du numérique à destination des élèves de primaire. Nous aurons également un rôle à jouer dans l’action “Tech pour toutes”, portée par la Fondation INRIA, qui ambitionne de faire venir 10 000 jeunes femmes dans les métiers du numérique à l’horizon 2027.